Arthur à Toronto

Arthur nous a laissé pour quelques mois. Après avoir fait ses preuves en Morbihan (champion en 2018 et 2019) et en Bretagne (champion en 2019) le voici parti à l’assaut de….l’ Ontario et de sa capitale ! Plus sérieusement, il profite ici de son peu de temps libre pour s’inscrire dans un tournoi, qui avait lieu le week-end dernier et tester les variantes locales. Voici donc un reportage très complet et très vivant sur la façon dont on peut aborder un tournoi d’échecs, partie après partie. Remercions Arthur pour la qualité de ses commentaires, technique et humour réunis, et on a vraiment l’impression de vivre les parties à ses côtés.

Site de l’ organisateur

 https://harthousechess.com/2020/01/27/reading-week-open-2020/

 Après déjà un mois à Toronto, je participe à mon premier tournoi au Canada. En plein centre-ville se trouve l’ Université de Toronto. Un campus immense, idéalement situé avec de très beaux bâtiments. C’est un endroit très vivant et rempli d’écureuils.

Mais il y a aussi un club d’échecs dans un centre culturel de l’université : le Hart House Chess Club. Ce dernier organisait un tournoi durant un week-end de trois jours. Six rondes de 90 minutes et 30 secondes par coup. Deux parties chaque jour à 10 et 16 heures, l’ occasion pour moi de pratiquer dans une cadence autre que le fameux 3+2 et de tester différents styles de jeu avec de nouveaux adversaires. 
Environ 150 joueurs se sont donc retrouvés pour ce tournoi et se sont répartis dans les cinq sections : – Crown- U2200- U1900- U1600- U1300. Il faut savoir qu’ au Canada, on utilise d’abord l’ elo national, qui semble un peu surévalué par rapport au elo international. Je me retrouve donc à jouer dans le tournoi U2200 avec le treizième elo.

Première ronde avec les blancs, contre un des plus faibles de ma section ça devrait aller !

Après cette première défaite je suis déjà un peu démoralisé. Mais bon je pars manger et me promener dans Toronto pour me changer les idées, après tout il fait beau et pas trop froid. En même temps, par rapport aux -17 ( et ressenti -28) de la veille, j’ai eu le temps de m’ habituer et ce n’ est pas à zéro degré qu’il fait froid !

Mais bon, me voilà de retour pour jouer ma deuxième partie. Je tombe contre le quatrième elo du tournoi, un joueur très créatif à ce qu’on m’a dit, amateur de gambits. Moi qui ne suis pas très en forme, ça ne semble pas être mon jour de chance. Pas grave, je vais tout bloquer et tenter de le manœuvrer. 

Première victoire. Tout c’est passé comme prévu dans cette partie. Je suis peut être lancé ! Mais bon, il ne faut jamais crier victoire trop tôt. Il faut rentrer se reposer car après huit heures de parties dans la journée la fatigue commence à se faire sentir.

Deuxième jour, Je peux me lever plus tard, car aujourd’hui pas besoin de pointer. Je connais déjà mon adversaire, il s’agit du troisième elo du tournoi, je l’ai vu jouer à côté de moi une belle partie gagnée après un sacrifice de Dame, il va falloir faire attention. En plus je double les Noirs.

Bon,.. un peu miraculé, je me retrouve à deux points et monte enfin vers les premières tables. Je vais cette fois-ci jouer contre un adversaire très largement moins bien classé que moi, peut-être l’occasion de me reposer… Ou de me taire. Ne jamais vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Bref, j’ai les Blancs et j’ai promis des gambits-roi avant le début du tournoi, j’espère enfin que quelqu’un va jouer e5.

Bon. Deux victoires avec les noirs et deux défaites avec les blancs. C’est le monde à l’envers, surtout pour moi. Et en plus je peux faire une croix sur le podium, mon objectif initial. Cependant, dans ce tournoi, et peut être d’autres au Canada, on a la possibilité de former des équipes.de quatre joueurs dans au moins trois différents tournois. Je participe avec trois joueurs de l’université de Toronto jouant dans les divisions U1600 et U1300. Malheureusement, d’autres équipes sont encore devant nous, il va falloir faire carton plein le dernier jour pour espérer quelque chose. Mais avec 4 points de retard, c’est hautement improbable. 


Dernier jour de compétition, le lundi, après avoir évacué toute la haine envers moi-même pour ces défaites ridicules, je me suis juré de jouer pour l’attaque coûte que coûte dans la partie suivante. Même pas peur, j’ai déjà perdu mes 2000 elo, je n’aurai pas de prix, je n’ai plus rien à perdre. Il n’y a pas plus dangereux qu’un animal blessé…!

Enfin une belle victoire. Je suis regonflé à bloc, en plus l’équipe a gagné ses quatre parties et nous n’accusons plus que 2,5 points de retard sur les premiers. Plus qu’une partie, et j’ai les Blancs. Il faut sauver l’honneur et en gagner au moins une avec les Blancs, bon sang. Mon futur adversaire était juste à côté de moi quand j’ai perdu la veille et a suivi toute ma partie du matin. Voyons voir ce qu’il m’a préparé que je change ses plans.

Et je finis le tournoi sur une victoire. Je finis donc quatrième ex æquo avec le huitième. Le seul départage étant le nombre de points, on ne peut pas savoir si je suis quatrième ou huitième mais qu’importe. Pour l’équipe, nous n’avons pas gagné non plus. Lors de la dernière ronde, nous n’avons marqué que 2.5 points sur 4. Mais ce fut une belle expérience qui m’a permis de mettre à jour mes problèmes d’estimation du danger. Au total, six ouvertures différentes en six rondes, des parties mémorables et d’autres déjà oubliées (la quatrième) et la rencontre de nombreux nouveaux joueurs d’ outre-atlantique !

La majestueuse salle du tournoi